Très récemment, les Journées du Patrimoine ont mis à l’honneur un patrimoine méconnu, mais important de notre commune : les puits, plus particulièrement ceux visibles de l’espace public.
Ce projet de présentation a été préparé de longue date par un passionné d’histoire, Jean Lacaze. En cette mi-septembre, il aurait dû nous en faire un exposé à l’occasion de cette manifestation. Malheureusement, le sort en a décidé autrement, car Jean est décédé en mai dernier, à l’âge de 77 ans.
À la demande de la mairie, j’ai eu l’honneur de participer à cette journée, en binôme avec mon cousin Raymond Normand, conseiller municipal. Les travaux de Jean ont été exposés à la salle Europe. Dans l’après-midi, nous nous sommes baladés dans les rues du bourg — sous un chaud soleil de fin d’été — à la découverte des puits, sympathique promenade agrémentée de contes et de chants marins.
Grâce à l’intérêt que portait Jean Lacaze pour tous ces puits, la réussite de cet évènement était certain. Là où il est, nous le remercions vivement !
Petite leçon d’histoire-géo
Situation géologique d’Angoulins
Notre village est construit sur un terrain de la période du Jurassique, environ -200 à -145 millions d’années. C’est l’ère des reptiles. Sous nos pieds, beaucoup de calcaire, de marne (mélange d’argile, de calcaire et de sable). Celle-ci est utile, elle sert à la fabrication du ciment, des tuiles et de la céramique.
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Sous cette couche de marne, le sol est imperméable. L’eau retenue et stockée s’appelle un aquifère (à ne pas confondre avec la nappe phréatique qui est une partie de l’aquifère). Elle circule librement, mais pour aller la chercher, la profondeur de forage peut varier suivant l’endroit où l’on se trouve.
Dans le bourg d’Angoulins, l’aquifère se trouve de 4 à 8 mètres sous terre, ce qui est peu profond. Toutefois, plus au sud, du côté de la Motte Grenet, la profondeur est supérieure à 10 mètres, voire jusqu’à 20. Les eaux souterraines viennent de l’est de notre département et du nord-est de celui de la Charente. Elles passent sous le sol du village et se jettent en mer. Cette nappe est très étendue, elle couvre l’Aunis et un tiers de la Charente. Cet aquifère alimente à son tour les nappes phréatiques (en grec « qui a trait au puits »).
La plupart des puits ont été creusés au Moyen Âge, simultanément à la construction des habitations. Une exception, il existe un puits remontant à l’époque gallo-romaine dans une ferme de l’autre côté de la nationale 137.
Les dernières maisons d’Angoulins ont eu l’eau courante en 1966. Les plus riches avaient l’eau du puits directement dans la maison. Pour les plus modestes, le puits est commun, il est situé au milieu des maisons sur une placette que l’on nomme ici quereux. Cette « communauté aquatique » est l’occasion de rencontres, donc de bavardages, donc de potins, et donc de commérages ! Le réseau social de l’époque !
Quels sont les différents types de puits ?
En dehors des puits de facture classique (margelle et conduit maçonné), le terme « puits » recouvre plusieurs significations.
- Le puits artésien, exsurgence formant un puits où l’eau jaillit spontanément. L’exsurgence est — en gros — synonyme de résurgence.
- Le puits de forage permet d’aller en profondeur, souvent avec des moyens mécaniques, le diamètre est en général étroit.
- Le puits perdu est l’inverse du puits ordinaire, l’eau qui ruisselle tombe dans ce puits pour alimenter la nappe souterraine.
- Le puits d’extraction permet de puiser les combustibles fossiles, comme le charbon, le gaz ou le pétrole.
- Le puits de lumière, là, on quitte le domaine aquatique pour entrer dans le domaine lumineux !
- Le puits sans fond, que l’on retrouve en général du côté de Bercy à Paris ! (Joke)
- Les puits de sciences sont situés dans des cervelles bien constituées !
Et, que dire du puits d’amour ?
Information de mon cousin Raymond (que je devais absolument mentionner !)
C’est avant tout une pâtisserie traditionnelle française, mais c’est aussi un opéra-comique en 3 actes de 1843, écrits par Eugène Scribe et Adolphe De Leuven, mis en musique par Michael William Balfe.
Et, pour terminer cette longue liste, un proverbe connu : « la vérité est au fond du puits ». Par ces temps de sécheresse, on arrive à la voir !
Localisation des puits
Aujourd’hui, on dénombre au moins une soixantaine de puits, de toute nature (public, privée) sur l’ensemble de la commune. Il en reste certainement beaucoup d’autres à répertorier !
Quelques puits à signaler
Ce puits était autrefois situé dans l’enceinte du presbytère, derrière le café des Charentes. Il y a bien longtemps, le mur a été reculé pour que le puits devienne accessible aux habitants du quartier. Mais, un problème est survenu : le baudet de Monsieur le Curé se trouvant dans le jardin du presbytère, comment l’abreuver facilement ? La solution est simple, il suffit d’aménager une niche dans le mur pour remplir l’abreuvoir.
La margelle de ce puits a ensuite été déplacée. Sa position première est sous la plaque de fonte devant la niche.
Ce puits est situé dans un quereux, impasse des Coquilles, qui relie la rue des Coquilles à la rue des Coquillages. Il est intéressant, car il a gardé une grande partie de ses accessoires au-dessus de la margelle, la potence pour soutenir le rouleau à corde (ou à chaîne), un bout de manivelle et l’auvent de protection.
Ce puits a une importance toute particulière. Au début du XIXᵉ siècle, il alimentait en eau les deux maisons à droite de cette fin d’impasse. Elles abritaient chacune une brûlerie (fabrication d’alcool). L’eau servait aussi au four banal (maison à gauche au bout de l’impasse) dépendant de la seigneurie de Jousseran, cours Gambetta juste en face. Cette dernière avait son puits, voir photo plus bas.
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Ce puits a la forme d’un cœur. Le romantisme se cache partout… 💙
Ce puits abriterait, dit-on, à mi-hauteur entre la margelle et le niveau de l’eau, une cavité qui pouvait servir de cache aux habitants en cas de danger ou du moins d’un endroit frais pour y stocker des vivres. Plus généralement, les puits servaient de cachette pour les objets précieux, de vieux fusils ont été retrouvés à l’occasion de divers travaux.
Un patrimoine à préserver
J’espère que cet article vous donnera l’envie de découvrir ou redécouvrir ce patrimoine. Il peut être l’occasion d’une belle promenade en famille ou entre amis. Ces puits ont été essentiels à la vie d’Angoulins et de ses habitants. Notre devoir est de les préserver et de les valoriser.
Quelques photos de puits visibles en se baladant. Photos personnelles sauf la dernière.
Documentation
Travaux et photos de Jean Lacaze
Travaux de localisation de la seigneurie de Jousseran, Expression’Hist, Denis Briand
Internet, uMap, OpenStreetMap.